I. Les Vory v Zakone
b. L'importance et la signification des tatouages des Vory v Zakone
On ne peut dater avec exactitude la généralisation des tatouages dans les prisons russes. On sait simplement que la pratique était déjà courante dès le XIXe siècle (date d'apparition des mafias russe) avant de se développer dans les goulags stalinien (organisme central gérant les camps de travail forcé en Union soviétique sous la dictature de Staline). La population carcérale russe est l'une des plus élevées au monde, du milieu des années 60 aux années 80, on estime que plus de 35 millions de personnes sont passés par la case prison. Parmi elles, entre 20 et 30 millions se sont fait marqué à l'encre indélébile. C'est au XIXe siècle au sein des prisons soviétiques que tout une sous culture liée à l'art des tatouages s'est développé.
C'est sous l'impulsion des sanguinaires Vory v Zakone que ces tatouages sont devenus pour eux un véritable symbole d'identité, de fraternité et d'histoire.
Les premières études sur le sujet, menées dans les années 20, montraient l’existence d’un code plus ou moins élaboré qui dépassait déjà le simple cadre purement esthétique.
Nous allons vous expliquez l'importance et la signification de certains tatouages.
Pourquoi?
Plus qu’un rite de passage, les tatouages agissent comme une carte de visite. Ils révèlent le parcours d’un détenu sans qu’il soit nécessaire de lui poser la moindre question. Les tatouages affichent le passé de celui qui les porte : nature du crime, durée de l’incarcération, rang prisonnier, tout ce qui détermine son degré de prestige par rapport aux autres détenus. Plus un criminel est tatoué, plus son vécu est important, ainsi, plus il est respecté en prison. Les motifs choisis par les prisonniers empruntent à la fois à l’art populaire et à la tradition russe : église, chats, images saintes, la Madone le Christ, architecture soviétique… Ces icônes détournées forment un langage social et politique, un code clandestin complexe.
Comment?
Se faire tatouer est illégal en prison. La pose se fait de manière artisanale par des artistes incarcérés. Ces derniers se font passés en sachets de thé ou en cigarettes. Les détenus se procuraient le matériel sur leur lieu de détention car ils travaillaient souvent dans des ateliers. L’encre pour les tatouages provient des talons des bottes brulés mélangés à de l’urine (qui agit comme un antiseptique). La mixture est ensuite piquée sous la peau avec une aiguille ou une corde de guitare aiguisée attachée à un rasoir électrique qui fait office de moteur. Dans de telles conditions, inutile de préciser que les infections sont nombreuses et les fièvres post-opératoires qui étaient monnaie courante. Certains détenus n'en survivent pas.
Des exceptions?
Il arrive que les tatouages puissent être enlevés, dans l’hypothèse où un prisonnier perd son rang, change d’affiliation ou de style de vie. Mais il se peut que le tatouage soit enlevé (avec un scalpel fait maison) contre la volonté de celui qui le porte. C’est le cas d’un prisonnier qui porterait un motif qu’il ne mérite pas, qui ne correspond pas à son parcours. Dans la même continuité, les catégories les plus « basses » (les homosexuels passifs ou les mauvais payeurs aux cartes) se faisaient tatouer contre leur gré des dessins obscènes, ou pire un triangle avec un cœur à l’intérieur. Ce motif, destiné aux pédophiles, signifiait qu’un détenu était « intouchable » et devait alors supporter tous les caprices sexuels des autres prisonniers. Un vor peut également décider du prochain tatouage d’un détenu placé sous son autorité.
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